Impossible de ne pas l’avoir entendu, le Gouvernement a décidé de la mise en place d’un barème d’indemnisation des licenciements sans cause réelle et sérieuse, censé rassurer les entreprises et encourager les embauches.
De quoi s’agit-il ? Ce barème a-t-il une chance de créer de l’emploi ?
Ce barème est tout simplement une grille qui détermine le montant minimal (plancher) et le montant maximal (plafond) auquel un employeur pourra être condamné à indemniser un salarié suite à un licenciement sans cause réelle et sérieuse. L’hypothèse visée est donc celle dans laquelle l’employeur est condamné pour avoir licencié un salarié sur la base d’un motif de licenciement qui est considéré par le Conseil de Prud’hommes comme n’étant pas démontré ou pas suffisamment important pour justifier d’un licenciement.
Le Conseil de Prud’hommes pourra toujours condamner l’employeur, la nouveauté étant qu’il devra fixer le montant de la condamnation dans la fourchette qui lui est imposée par le barème. Jusqu’à présent un minimum existait mais aucun plafond n’était fixé.
Exemples :
– Dans une entreprise d’au moins 11 salariés :
- Salarié ayant 1 an d’ancienneté : montant minimum de la condamnation (plancher) : 1 mois de salaire brut / Montant maximum de la condamnation (plafond) : 2 mois de salaire brut ;
- Salarié ayant 5 ans d’ancienneté : Plancher : 3 mois de salaire brut / Plafond : 6 mois de salaire brut ;
- Salarié ayant 20 ans d’ancienneté : Plancher : 3 mois de salaire brut / Plafond : 15,5 mois de salaire brut
Dans une entreprise de moins de 11 salariés :
- Salarié ayant 1 an d’ancienneté : Plancher : 0,5 mois de salaire brut / Plafond : 2 mois de salaire brut ;
- Salarié ayant 5 ans d’ancienneté : Plancher : 1,5 mois de salaire brut / Plafond : 6 mois de salaire brut ;
- Salarié ayant 20 ans d’ancienneté : Plancher : 3 mois de salaire brut / Plafond : 15,5 mois de salaire brut.
Retrouvez le barème complet ici.
Notons une exception de taille, le plancher est relevé à 6 mois de salaire et aucun plafond ne sera applicable dans un certain nombre d’hypothèses. Tout particulièrement lorsqu’il y aura eu violation d’une liberté fondamentale (liberté d’expression, droit de grève, respect des convictions religieuses, etc.) , un cas de harcèlement moral ou sexuel, une action en justice en matière de discrimination, une action en justice en matière d’égalité professionnelle, la violation du mandat d’un salarié protégé, un licenciement pendant la suspension du contrat de travail pour accident du travail ou maladie professionnelle.
L’intérêt théorique de ce barème est d’encourager les entreprises à embaucher parce qu’elles connaissent le risque maximum de condamnation avant de licencier un salarié. D’un point de vue très pragmatique, il semble tout de même que les plafonds demeurent suffisamment élevés pour que la grande majorité des entreprises cherche à éviter au maximum tout risque de condamnation, et donc continue de limiter les licenciements aux cas qu’elle estime justifiés et pense pouvoir démontrer.
Notons en outre que la liste des exceptions à l’application du barème est suffisamment large pour que l’entreprise n’ait aucune certitude avant de licencier qu’elle ne se trouvera pas dans l’un des cas d’exceptions visées.
La mise en place de ce barème et des cas de dérogations ne semble donc pas constituer un « permis de licencier » comme certains ont pu l’affirmer. Elle peut en revanche être considérée comme la réduction du risque entrepreneurial, dans la mesure où le risque de condamnation aux Prud’hommes est mieux encadré qu’il ne l’était jusqu’à présent. Est-ce pour autant une mesure suffisante pour encourager les embauches ? Difficile à croire…
Monsieur François DUTEIL, Responsable des Ressources Humaines du Groupe Vivialys, avec lequel j’ai pu échanger considère également que la création de ce barème n’impactera pas les pratiques RH : « Il faudrait développer mais pour moi et pour un DRH un recrutement doit être prévu et planifié. Penser à une sortie plus facile parce que les indemnités CPH sont plafonnées est pour moi à des années lumières de la politique de création de richesse.
Idem pour le recrutement. Maintenant la taille de notre entreprise amène à cette analyse et nous devons avoir vis à vis de nos collaborateurs un devoir d’accompagnement et de formation…avec tout le formalisme que cela impose. Si nous sommes « over line » il faut négocier tout comme les anglo-saxons. Finalement pour dire que cela ne changera en rien la politique RH mise en place, c’est à dire le développement de l’entreprise et des collaborateurs. Pour les toutes petites entreprises les choses sont certainement différentes et le Back office souvent inexistant ! ».
Ping : La procédure de licenciement : Nouveautés des ordonnances Macron